L’émulsification : la fabrication d’émulsion

Le terme émulsion vient probablement du latin « emulgere », qui signifie « traire ». Ce terme désigne aujourd’hui un système comprenant au moins deux liquides non miscibles, dont l’un est dispersé dans l’autre, sous une forme plus ou moins stable. Rigoureusement parlant, une émulsion est instable du point de vue de la thermodynamique. En pratique, on constate cependant des stabilités qui peuvent atteindre plusieurs années. La stabilisation du système dépend à la fois de l’énergie dépensée pour disperser un liquide dans l’autre et du savoir faire du formulateur à qui revient le choix des stabilisants.

La fabrication des émulsions est connue depuis l’Antiquité, mais leur étude scientifique ne date que du début du 20e siècle. En quelque 90 ans, la connaissance et l’utilisation des émulsions dans différentes applications a pris une ampleur extraordinaire.
Cet article tente de décrire de manière concise l’élaboration et l’étude d’une émulsion.

 L'émulsification : la fabrication d'émulsion

 1- Définitions :

 émulsion :

Une émulsion est un mélange homogène de deux liquides ou phases peu ou pas miscibles. Ce mélange correspond à une dispersion de gouttelettes de l’une des phases dans l’autre. On distingue donc
une phase dispersée et une phase continue.

 émulsion eau dans huile (E/H) et émulsion huile dans eau (H/E)

On parlera d’émulsion eau dans huile (E/H) si la phase continue est une phase grasse, et d’émulsion huile dans eau (H/E) si la phase continue est constituée d’un liquide polaire associé (d’ordinaire, il s’agit d’eau ou d’une solution aqueuse).

  • Concernant les mélanges binaires, il convient de préciser le vocabulaire :
  • Émulsion H/E

Le mélange est constitué de particules ou gouttelettes lipophiles (L) ou huileuses (H) dispersées dans une phase aqueuse (E) ou phase hydrophile (H). On parle encore d’émulsion directe.
On parle donc indifféremment d’émulsion H/E ou L/H.

  • Émulsion E/H

On parle d’émulsion eau dans huile (E/H) ou hydrophile-lipophile (H/L).
Dans ce type d’émulsion ou , la phase discontinue est la phase aqueuse(E) ou hydrophile. On parle encore d’émulsion inverse.
La phase continue ou dispersante est la phase grasse (H) ou lipophile (L).

En règle générale, la fraction volumique de la phase continue est
plus importante. Lorsque la phase continue est minoritaire en
volume (moins de 30 %), on parle d’émulsions concentrées.

La taille des gouttelettes formant la phase dispersée d’une émulsion est typiquement de l’ordre du micromètre (0,1 à 100 μm) et impose l’aspect blanc opaque commun à la plupart des émulsions.
Une émulsion peut être fluide, crémeuse ou même gélifiée, donnant toute une gamme de textures qui expliquent l’intérêt que portent à ces systèmes des domaines industriels tels que la cosmétique, la pharmacologie et l’agroalimentaire.

L’aspect des émulsions dépend de la dimension des particules dispersées :

  • émulsion jaunâtre : particules supérieures à 5 microns elles sont plus ou moins stables.
  • émulsion blanc-laiteux : particules comprises entre 5 à 1 microns, elles sont stables.
  • émulsion à reflets bleutés : particules comprises entre 1 à 0,1 micron
  • émulsion transparente : particules inférieures à 0,1 micron, il s’agit alors d’une microémulsion.

 Les émulsions multiples, dites mixtes ou triples

Il en existe 2 types :

  • Les émulsions hydrophile-lipophile-hydrophile (H/L/H) ou (E/H/E).
    Une phase huileuse sépare les phases aqueuses internes et externes.
    Elles sont généralement utilisées dans les produits cosmétiques hydratants.
  • Les émulsions lipophile-hydrophile-lipophile (L/H/L) ou (H/E/H) .
    Une phase aqueuse sépare les phases huileuses.
    On les fabrique en réalisant une 1ère émulsion H/L ou L/H, que l’on disperse ensuite dans une phase aqueuse, ou huileuse selon le cas.

Les microémulsions

Elles sont parfois dites émulsoïdes et sont formées d’huile, d’eau et d’une quantité importante de tensio-actifs. Elles sont d’aspect transparent ou parfois bleutées, à faible viscosité (résistance à l’écoulement), formées de gouttelettes entre 10 à 15 nm.

Elle forme un système homogène avec une structure particulière où les molécules, lipophiles, hydrophiles et les tensio-actifs, s’imbriquent les unes dans les autres.
Elles sont très stables, et favorisent l’absorption cutanée, améliorant ainsi le confort et l’aspect de la peau.
Elles sont prisées en cosmétologie et notamment dans les soins pour le bain car la microémulsion E/H passe H/E dans l’eau !

 2- Exemples d’émulsions :

  • Émulsion H/E :

En agro-alimentaire, c’est le type d’émulsion le plus courant.
Filière « lait » : lait entier, crème, crème glacée...
Filière « produit carné » : pâtes fines (knackies, saucisses de Francfort, saucisses de Strasbourg, mousse de foie,...)
Autres produits alimentaires : sauce mayonnaise...

En cosmétique : crème nutritive. Passée sous l’eau, elle s’en va facilement. Les crèmes pour les mains sont souvent des émulsions H/E. Elles sont plutôt nutritives.

  • Émulsion E/H :

En agro-alimentaire, ce type d’émulsion est plus rare.
Beurre, Margarine...
En cosmétique : les crèmes protectrices. Lors du lavage de mains enduites d’une crème à base d’émulsion E/H, l’eau va perler sur les mains en raison du film lipidique qui reste sur la peau et qui s’élimine difficilement.

 3- Formulation

Pour réaliser une émulsion, deux liquides non miscibles sont
nécessaires : une phase non polaire appelée phase grasse et une phase polaire ou phase aqueuse.

31- Les ingrédients de la phase grasse :
La phase lipophile, huileuse peut se composer de différents éléments liposolubles (solubles dans l’huile) comme :

Les cires qui sont des corps gras solides à température ordinaire et qui fusionnent (deviennent liquides) en générale au dessus de 50°C.

  • Cires animales comme la cire d’abeille, le blanc de baleine.
  • Cires végétales comme le carnauba issu du palmier brésilien.
  • Cires minérales comme la paraffine issue de la séparation de produits pétrolifères, l’ozokérite, ou autres cires fossiles.
  • Cires synthétiques comme les esters gras solides, dites aussi cire purcelin.

Les graisses qui sont semi-solides à T° ordinaire, elles ont un point de fusion plus faible.

  • Graisses animales comme la lanoline issue de la laine de mouton, le suif de bœuf, l’axonge de porc, le jaune d’œuf.
  • Graisses végétales comme le beurre de cacao ou de karité.
  • Graisse minérales comme la vaseline blanche.
  • Graisses synthétiques comme les esters gras, palmitate d’isopropyl.

Les huiles qui sont liquides à T° ordinaire.

  • Huiles animales comme l’huile de foie de requin, l’huile de vison, l’huile de tortue.
  • Huiles végétales comme celles d’arachide, d’olive, d’amande douce, de germe de blé, de maïs, de soja, d’avocat…
  • Huiles minérales comme celle de vaseline, de paraffine.
  • Huiles synthétiques comme les esters d’acide gras (myristate d’isopropyl), les alcools gras (alcool oléique).

Les composants liposolubles que l’on incorpore aux émulsions, qui sont des principes actifs, comme :

  • Le carotène,
  • Les insaponifiables de soja, de luzerne, d’avocat,
  • Les vitamines liposolubles (A, D, E, K, F).
  • Les parfums,
  • Les antioxydants,
  • Certains conservateurs antimicrobiens,
  • Certains émulsifiants.

32- Les ingrédients de la phase hydrophile ou aqueuse :
L’eau sert de solvant, on y trouve de nombreux éléments hydrosolubles (solubles dans l’eau) comme :

Les humectants qui empêchent l’évaporation de l’eau et donc la déshydratation.
Ils augmentent le mouillage, c’est-à-dire le contact entre émulsion et la surface où on l’applique.

  • Le glycérol
  • Les polyalcools

Les conservateurs, tels que les antimicrobiens hydrosolubles.

Les conservateurs

Ce sont les substances qui sont ajoutées comme ingrédient à des produits cosmétiques principalement pour inhiber le développement des micro- organismes dans ces produits.

Législation  : Liste positive, Annexe VI de la Directive Cosmétique Européenne.

  • bactériostatique : empêche le développement des bactéries
  • bactéricide : tue les bactéries
  • fongistatique : empêche le développement des champignons microscopiques
  • fongicide : tue les champignons microscopiques.

ACTIONS :

  • altèrent les systèmes enzymatiques de la cellules bactérienne
  • dénaturent les protéines
  • dénaturent les acides nucléiques (ADN & ARN)

Rôles des conservateurs :
Rôle de protection du produit cosmétique lors de sa fabrication :

  • les matières premières
  • les articles de conditionnement
  • l’atmosphère des ateliers
  • le personnel
    Rôle protecteur lors du prélèvement par le consommateur.

Principaux types de produits :

  • LES PARABENS ou esters de l’acide 4- hydroxybenzoïque (bactéricides - fongicides)
  • L’ACIDE SORBIQUE (fongicide) sous la forme de sorbate de potassium
  • LE FORMOL (bactéricide et fongistatique) allergisant —> pratiquement plus utilisé.
  • LES DONNEURS DE FORMOL (bactéricides et fongistatiques)
  • Bronidox
  • Broponol
  • DMDM hydantoïne.
  • L’ACIDE DEHYDROACETIQUE
  • LE METHYL DIBROMOGLUTARONITRILE
  • L’ETHANOL actif comme conservateur, concentration supérieure à 20%
  • certaines HUILES ESSENTIELLES : lavande, romarin, eucalyptus, glou de girofle.

Les antioxydants

Ils empêchent les phénomènes d’oxydation en captant l’oxygène libre. Ils contiennent dans leur molécule un ou plusieurs groupements hydroxyles (-OH), responsables du piégeage de l’oxygène.

Pas de législation propre. Il n’existe pas encore de liste positive. Ceux choisis sont ceux autorisés et réglementés par la législation alimentaire.


FACTEURS favorisant l’oxydation :

  • plus c’est saturé et plus ça oxyde
  • présence d’air
  • présence de traces de métaux (fer, cuivre)
  • lumière & chaleur.

Rôles des antioxydants :
Ils protègent du rancissement les produits cosmétiques contenant des corps gras oxydables tels que les huiles végétales animales qui contiennent des acides gras insaturés.

ANTIOXYDANTS d’origine synthétique

  • BHT
  • BHA
  • les gallates, esters de l’acide gallite

ANTIOXYDANTS d’origine naturelle

  • ACIDE ASCORBIQUE (vitamine A) --- hydrosoluble
  • alpha- tocophérol (vitamine E) --- liposoluble
  • EDTA n’est pas un antioxydant mais souvent associé avec pour augmenter leur action.

Des principes actifs hydrosolubles comme :

  • Les vitamines,
  • Les agents hydratants : hydrolats…,
  • Les extraits végétaux,
  • Les extraits biologiques.

Certains émulsionnants ou émulsifiants, comme les tensio-actifs ou les esters.

Des colorants.

 4- La stabilité d’une émulsion

Lors de l’élaboration d’une émulsion, on retrouve de nombreuses surfaces de séparation entre les différentes phases, appelées interfaces. Celles-ci se caractérisent par des propriétés physico-chimiques caractéristiques. En effet, cet espace est dans un état énergétiquement différent due à la présence d’une tension interfaciale (notée Vint). Celle-ci s‘explique par une réorganisation des molécules au niveau de la zone de contact induisant de nouvelles interactions. Cette force correspond à l’énergie qu’il faut apporter pour attirer les molécules vers l’interface. On peut déterminer sa valeur en faisant le rapport entre la variation d’énergie libre dF et la variation de surface notée dS.

Cette force doit être la plus réduite possible afin d’assurer la stabilité temporelle de l’émulsion. Les molécules tendent ainsi à réduire la surface séparant les deux phases ce qui se traduit par l’apparition de gouttelettes de forme sphériques assurant un rapport volume/surface optimal.
Un des objectifs majeurs lors de la formulation d’une émulsion stable est donc de réduire la tension interfaciale. Cela est possible en ajoutant des molécules capables d’abaisser cette barrière énergétique.

Une émulsion est dite stable lorsque le mélange reste homogène, c’est à dire lorsqu’elle ne se sépare pas en ses deux phases constituantes.

[(L’émulsion : un système physique stable mais un système thermodynamiquement instable
1 : fabrication de l’émulsion : du système biphasique hétérogène vers un mélange homogène
2 : déstabilisation du mélange vers un système thermodynamiquement plus stable)]

Or une émulsion est un système qui n’est pas à l’équilibre thermodynamique (équilibre thermodynamique = égalité des potentiels
chimiques de chaque espèce chimique dans toutes les phases).
La stabilité des émulsions n’existe que parce que le formulateur est
capable de ralentir ou d’inhiber les mécanismes physiques qui
conduisent normalement à la démixtion des phases
non miscibles.
On recense les mécanismes de déstabilisation suivants :

 41- Les mécanismes de déstabilisation :

a- La floculation est la formation de flocons de particules dispersées ou micelles au sein de l’émulsion.

Cette phase est précurseur de la sédimentation ou du crémage et est réversible.

b- Le crémage , qui est la remontée en surface des particules dispersées.

Ce phénomène lié à la pesanteur (loi de Stokes) et à la mauvaise quantification des éléments composants l’émulsion va former des micelles (microgouttelettes) à la surface, car la phase dispersée est plus légère que la phase dispersante.

c- La sédimentation qui est la formation de particules dispersées au fond de la préparation, est aussi liée à la pesanteur (loi de Stokes) , ici à l’inverse la phase dispersée est plus lourde que l’autre.

Ces 2 ruptures, entraîne la séparation de l’émulsion initiale en 2 émulsions, où l’une est plus riche que l’autre en particules dispersées, on obtient un condensat.
Ces phénomènes sont réversibles.

d- La coalescence provoque la formation d’un amas au sein de l’émulsion par fusion des micelles entre elles.

La coalescence est un phénomène irréversible qui résulte de la rupture du film interfacial entre les gouttelettes de la phase dispersée. Elle engendre une réduction de la surface interfaciale, ainsi les forces qui s’exercent sur la gouttelette sont moindres, aboutissant à un état plus stable.
Ces interactions entre gouttelettes sont à contrôler : il s’agira de stabiliser l’interface, jouant avec les forces répulsives pour contrecarrer les forces attractives, de nature électrostatiques (tensioactifs ioniques chargés au niveau de la surface des gouttelettes) ou stériques.

e- L’inversion de phase,

C’est un processus au cours duquel la préparation émulsionnée passe, par exemple, d’une émulsion eau dans huile (H/L) à une émulsion huile dans eau (L/H) par l’adjonction trop important de phase huileuse, cette rupture de l’émulsion initiale est irréversible.

f- Le mûrissement d’Ostwald

Le mûrissement d’Ostwald est un phénomène irréversible pendant lequel les plus petites gouttelettes en solution dans la phase continue se dissolvent et se déposent sur des gouttelettes plus grosses afin d’atteindre un état thermodynamiquement plus stable dans lequel le rapport surface / surface est minimisé. La force motrice pour le mûrissement d’Ostwald est la différence de pression de Laplace entre petites et grandes gouttelettes. La pression plus élevée chez les plus petites gouttes les mène à migrer vers les gouttes de diamètre plus important.
Le murissement d’Ostwald se produit au cours du vieillissement des émulsions et est irréversible, cependant il ne rend pas l’émulsion mauvaise.

 42- Les émulsifiants :

Pour fabriquer une émulsion, outre l’énergie mécanique nécessaire pour disperser en fines gouttelettes la phase dispersée dans la phase dispersante, il est souvent nécessaire de recourir à des molécules capables de baisser la tension interfaciale entre les deux phases. On parle d’émulsifiant, d’émulsionnant ou d’émulgateurs.
Ce sont des substances qui facilitent l’émulsification et contribuent à la stabilité de l’émulsion résultante.

421- Les émulsifiants simples

a- Les tensioactifs ou suractifs
Il s’agit le plus souvent de petites molécules amphiphiles appelées tensioactifs, surfactifs, surfactants ou agents de surface. La schématisation classique des tensioactifs met en évidence un pôle hydrophile et un pôle hydrophobe
Leur molécule est composée d’un groupement hydrophile (partie qui aime l’eau) et d’un autre lipophile (partie qui aime l’huile).

La molécule de tensioactif va s’orienter différemment suivant qu’elle est dans une émulsion E/H ou H/E et former un film autour de la gouttelette ce qui va ainsi lutter contre les phénomènes de floculation et coalescence (déstabilisation de l’émulsion).

b- La balance HLB
On choisit les émulsifiants en fonction de leur HLB (balance hydrophile lipophile) qui oriente le sens de l’émulsion.

La HLB (Hydrophilic-Lipophilic Balance, ou équilibre hydrophile/lipophile) est une grandeur caractéristique d’un tensio-actif.

La HLB est une méthode, qui permet de chiffrer l’équilibre existant entre la partie hydrophile et la partie lipophile de la molécule de tensioactif, équilibre lié à la solubilité dans l’eau.
Calcul de HLB d’une molécule

HLB = 20* Masse molaire (partie Hydrophile)/Masse molaire totale

L’échelle varie de 0 à 20 (bornes exclues sinon les molécules ne sont plus des tensioactifs) : plus la valeur est élevée, plus la solubilité dans l’eau est grande.

On peut aussi déterminer une HLB pour un mélange de tensioactifs.

Il existe des tables de HLB pour différents tensioactifs.

  • Si on obtient une HLB comprise entre 1 et 6, on a typiquement affaire à un tensioactif hydrophobe qui stabilisera préférentiellement des émulsions de type eau dans l’huile, E/H.
  • Pour une HLB supérieure à 10, il aura clairement un caractère hydrophile et donnera surtout des émulsions H/E.

c- classement en fonction de la charge

On peut classer les molécules tensioactives en fonction de la charge de la tête hydrophile :

  • Les tensioactifs anioniques : La tête polaire est chargée négativement. Par exemple, les ions carboxylates ou sulfonates.
  • Les tensioactifs cationiques  : La tête polaire est chargée positivement. Par exemple, les amines protonées ou encore les ammoniums quaternaires. Cependant, ce type de tensioactifs regroupe des molécules toxiques et irritantes, leur utilisation est donc limitée.
  • Les tensioactifs zwitterioniques ou amphotères : La tête hydrophile porte à la fois une fonction acide et basique. En fonction du pH du milieu, le tensioactif ne libère pas le même ion. En milieu basique, ce tensioactif se comporte comme un anion et en milieu acide comme un cation. C’est le cas des phospholipides (comme les lécithines) mais aussi des bétaïnes.
  • Les tensioactifs non ioniques : La tête polaire n’est pas chargée mais elle possède des groupements polaires susceptibles de créer des liaisons hydrogènes. Par exemple, les esters de glycol ou encore des éthers d’alcool gras.

d- Ex de tensioactifs

En agro-alimentaire, les émulsifiants font partie des additifs alimentaires. Leur rôle est de lier les phases grasses et aqueuses des produits aussi divers que les sauces mayonnaises, les pâtes fines charcutières (knackies, mousse de foie...)
E 322 : lécithine (présent naturellement dans le jaune d’œuf et le soja)
E 471 : Mono et diglycérides d’acides gras
E 472 : esters de mono et diglycérides d’acides gras
E 473 : sucroesters
E 474 : sucroglycérides
E 481 : stéaroyl-2-lactylate de sodium
E 482 : stéaroyl-2-lactylate de sodium
etc...
A noter que naturellement les protéines de la viande (actine et myosine) ont un excellent pouvoir émulsifiant à condition de savoir les mettre en valeur (extraction en présence de sel du fait de leur nature halosoluble) ne pas les dénaturer pendant les process de fabrication (congélation, cuttérage excessif...)

e- Les épaississants-gélifiants
Les épaississants et/ou gélifiants aqueux ou huileux augmentent la viscosité de la phase huileuse ou eau et empêchent ainsi les gouttelettes dispersées de remonter en surface.
Exemples : gomme, dérivés de la cellulose, gélatine, alginates, pectine, gélose.

f- Les raidisseurs d’interface

Ce sont des particules solides pulvérulentes (à l’état de poudre) qui se placent autour des particules dispersées, les maintiennent ainsi éloignées les unes des autres et les immobilisent.
Exemple : talc, bentonite.

422- Les émulsifiants complexes

ils ont une double activité : tensio-actifs et gélifiant à la fois.
a-Les auto-émulsionnants
Les auto-émulsionnants pour les émulsions huile dans eau L/H comme les cires de lanette à base d’alcool gras et de syndet anionique.

b- Les bases d’absorption
Les bases d’absorption pour les émulsions H/L ; par exemple les graisses minérales comme la vaseline auxquelles on ajoute des émulsionnants comme la lanoline ou ses dérivés.

 43- caractérisation des émulsions

Pour caractériser une émulsion différents critères doivent être évalués grâce à différentes méthodes.

1- Le sens de l’émulsion (ou le type d’émulsion).
On différencie deux types d’émulsions selon la répartition des différentes phases employées. Une émulsion est dite directe (notée H/E pour Huile dans Eau) lorsque la phase dispersante est hydrophile et que la phase dispersée est lipophile.
Au contraire, une émulsion inverse (notée E/H pour Eau dans Huile) se caractérise par une phase dispersante lipophile et une phase dispersée hydrophile.

Le sens se détermine à l’aide de différents tests :

  • test de la goutte ou lavabilité (ajout d’une goutte d’émulsion dans de l’eau ou de l’huile pour observer si elle se disperse).
    Déposée en petite quantité sur la peau, les émulsions de type aqueux (H/E) se rincent facilement à l’eau, à l’inverse des émulsions de types huileux (E/H).
  • test colorimétrique
    Le test est basé sur la diffusion de colorants en poudre dans un échantillon d’émulsion déposé sur une lame.
    2 tests sont réalisé en parallèle : l’un avec un colorant hydrophile (exemple : érythrosine, bleu de méthylène...), l’autre avec un colorant lipophile (ex : rouge de soudan III, rouge-marron...). La diffusion du colorant dans les phases respectives de l’émulsion donne la nature aqueuse ou lipophile des phases respectives grâce à une observation au microscope optique. Voir exemple ci dessous.
    Application :
  • Flacon de bleu de méthylène (Colorant aqueux, miscible que dans une phase Hydrophile),
  • Rouge Soudan en poudre (Colorant lipidique, miscible que dans une phase Lipophile)
    + spatule.
    Observation au microscope (*10 puis *40) entre lames & lamelles :
  • Conductimétrie :
    la conductivité mesurée est celle de la phase continue. La conductivité d’une phase hydrophile (donc d’une émulsion H/E) est de l’ordre de 1mS alors que celle d’une phase lipophile est quasi nulle (<1µS).

2 - Le diamètre des gouttelettes dans la phase dispersée est obtenu par granulométrie.

L’analyse granulométrique est très pratiquée dans l’industrie, le diamètre moyen et la distribution de taille étant déterminants pour la stabilité de l’émulsion.
Les techniques sont nombreuses : la diffraction ou diffusion de la lumière (laser) est la technique la plus utilisée.

On distingue trois grandes catégories d’émulsion selon la dimension des gouttelettes présentes dans la phase dispersée. En les classant dans l’ordre croissant de taille, on trouve les micro-émulsions, nano-émulsions, et macro-émulsions. De plus chacun de ces types d’émulsion possède des caractéristiques qui lui sont propres.

3- Contrôle de la stabilité Physique

La stabilité physique :
Il existe 3 types de stabilité :

  • la stabilité microbiologique fixée par des normes ; elle sera conditionnée par l’efficacité des conservateurs utilisés dans la formulation.
  • la stabilité chimiquequi implique que la coexistence des ingrédients de la formulation n’interagissent pas entre eux pour affecter la qualité de l’émulsion.
  • la stabilité physiquequi correspond au maintient de l’émulsion dans un état de dispersion homogène sans démixtion ou rupture. Il existe deux tests de contrôle de stabilité physique : la stabilité en temps réel et en temps accéléré.

Contrôle de la stabilité physique en temps réel :
on parle de test de stabilité en éprouvette ou bottle test.
Des échantillons d’émulsion sont placés en éprouvettes graduées et incubées dans des étuves obscures à température fixe. Cette méthode reproduit fidelement les conditions naturelles du vieillissement et donne des résultats fiables. L’inconvénient est la durée. Une variante plus utilisée sur les produits finis consistent à faire des lectures à J+1, J+8,...

Contrôle de la stabilité physique en temps accéléré :

On parle de vieillissement accéléré très utilisé en industrie.
Deux types de méthodes sont utilisées : le vieillissement en enceinte climatique & la centrifugation.

  • Vieillissement en enceinte climatique :
    Cela consiste à mettre à l’étuve à température élevée (ex 50°C) pendant une durée donnée (1 semaine par ex) un échantillon de l’émulsion.
    Des barèmes de correspondance existent entre les tests de vieillissement naturels et accélérés : une stabilité de [7 j - 50°C] = [ 30j -40°C]= [4 ans - T°C ambiante]. Ces équivalences n’ont rien de normatifs, mais des étalons internationaux sont développés pour certains produits.
    Un autre type de protocole consiste à faire subir aux échantillons une succession de variations de températures (réchauffement puis refroidissement) pour reproduire les cycles thermiques potentiellement subit par le produit fini dans sa vie réelle (stockage, transport, utilisation).
  • Vieillissement accéléré par centrifugation :
    On place l’échantillon dans une centrifugeuse de préférence à température fixe. On vérifie ensuite la stabilité de l’émulsion.

4- Contrôle de la rhéologie
La rhéologie caractérise les caractéristiques d’écoulement d’un fluide. On peut mesurer la viscosité avec un viscosimètre, ou d’autres paramètres comme la dureté, l’élasticité, la résistance avec un texturomètre.

5- L’analyse sensorielle
Des contrôles sensoriels sont réalisés pour vérifier que le produits formulé correspond bien au cahier des charges et est adapté au client initialement ciblé (marketing).
Des tests discriminatifs peuvent être réalisés pour vérifier l’absence de différence avec le produit témoin, la concurrence, ou évauer la perte de qualité au cours du vieillissement.
D’autres test descriptifs peuvent servir à décrire sensoriellement le produit. Enfin des test hédoniques sont pratiqués auprès d’un panel de consommateurs cibles pour apprécier l’acceptabilité du produit.

 5- Fabrication des émulsions

De nombreux paramètres du process de fabrication influencent la qualité d’une émulsion :

  • l’ordre d’incorporation des ingrédients
  • type de procédé (batch ou continu)
  • la géométrie du dispositif d’agitation
  • la vitesse d’agitation
  • la durée d’agitation
  • l’évolution de la température pendant l’émulsification
  • ...

 51- Les étapes du process

La préparation des émulsions s’effectue en deux étapes majeures :

  • dispersion ou pré-émulsification  : mise en suspension de gouttes d’environ 100 μm dans la phase continue ;
  • homogénéisation : réduction de la taille des gouttes.

Les étapes de fabrication, de la préparation de chaque phase au conditionnement du produit fini, sont résumées dans le process suivant :

a- Préparation des 2 phases

L’objectif est d’obtenir deux phases homogènes à une température définie. L’obtention d’une phase huileuse homogène implique un chauffage des différents ingrédients (certains ne sont pas liquides à température ambiante) de façon à réduire leur viscosité. Les températures d’usage sont comprises entre 70 °C et 90 °C.
Les émulsifiants sont ajoutés à la phase dans laquelle ils sont le plus solubles. Certains additifs, généralement liposolubles, sont ajoutés à cette étape. Les éventuels additifs volatils (parfums...) ou thermolabiles (certains additifs) sont introduits après ou en cours de refroidissement.
L’homogénéité de chaque phase est obtenue grâce à une agitation en cuve par une hélice ou une turbine et une ancre mobile qui optimise les transferts thermiques.

b- Dispersion

Le mélange grossier des deux phases s’effectue dans une cuve avec mobiles d’agitation. Le résultat de cette étape est déterminé par :

  • le type de mobile ;
  • la position du mobile ;
  • le mode d’introduction des phases (ordre, vitesses
  • la température ;
  • la vitesse et la durée du mélange.

Deux protocoles principaux d’introduction des phases se pratiquent :

  • introduction dans la cuve de la phase aqueuse et la phase huileuse puis agitation ;
  • introduction d’une des deux phases dans la cuve et incorporation progressive de l’autre phase en cours de mélange. Dans ce cas, la vitesse d’incorporation est déterminante : une vitesse trop élevée peut provoquer une inversion de phase non désirée.

c-Homogénéisation

La réduction de la taille des gouttes implique un fort cisaillement. Le choix de la méthode et des paramètres opératoires se fait en fonction de la gamme de taille à atteindre et de la viscosité du pré mélange.

d-Refroidissement et finition

La vitesse de refroidissement dépend de efficacité des échanges thermiques et donc du mobile d’agitation. La finition consiste à ajuster les propriétés de l’émulsion aux spécifications attendues par ajout d’additifs.

e-Procédés discontinus et continus

La fabrication d’une émulsion de façon discontinue se fait en cuve. C’est le procédé en batch. La cuve doit être vidangée en fin d’opération et les fluides renouvelés pour une nouvelle fabrication.

Le processus continu ou en ligne implique la mise en circulation des fluides par des pompes et le contrôle des débits. Les installations industrielles en ligne sont généralement automatisées.

Le tableau ci-dessus indique les dispositifs utilisables à chaque étape de la fabrication en discontinu ou en ligne. En plus de la possibilité d’être alimentés en continu les procédés en ligne ont l’avantage de permettre un bon contrôle des temps de séjour avec un comportement hydrodynamique simple (de type écoulement piston : le liquide progresse à la manière d’un piston dans un cylindre, la température est homogène, etc).

Des systèmes multi-étages ou des boucles de recyclage sont parfois nécessaires pour atteindre l’objectif fixé (généralement en terme de granulométrie).

En effet, si le débit d’opération est élevé, le temps de séjour du produit dans l’appareil est trop court pour permettre une homogénéisation efficace. Enfin il faut préciser que certains procédés accomplissent à la fois la dispersion et l’homogénéisation.
La figure suivante montre deux exemples d’installations en continu, l’un avec une phase de dispersion en cuve d’agitation, l’autre sans. Des systèmes de production de vide, de régulation thermostatique et de recyclage peuvent être rajoutes sur les installations.
Installation continue avec cuve de pré-mélange

Installation continue sans cuve de pré-mélange

f-Pression et température

Quel que soit le procédé sélectionné, la stabilisation chimique de l’émulsion implique d’introduire le moins d’air possible en cours de fabrication et lors du conditionnement (sauf dans le cas de certaines émulsions alimentaires où l’air fait partie de la structure du produit). Les étapes de dispersion et d’homogénéisation s’effectuent donc sous vide.

Le choix des températures d’opération obéit a plusieurs contraintes :

  • fluidité des ingrédients à mélanger : certains ingrédients sont solides ou très visqueux à température ambiante et doivent donc être chauffés pour que chaque phase soit homogène, et pour que l’homogénéíté de la dispersion soit garantie ;
  • préservation des ingrédients thermolabiles : certaines molécules actives dans les cosmétiques ou les médicaments, et certains composants des ingrédients de base des émulsions alimentaires, sont altérés à des températures modérées. Dans certains cas, il est possible d’ajouter un ingrédient fragile à froid, après une étape de dispersion à température élevée. ll faut alors s’assurer que l’augmentation de viscosité liée à la baisse de température n’empêche pas la répartition homogène de l’ingrédient rajouté (les contrôles d’homogénéité sont particulièrement importants pour les émulsions pharmaceutiques).

Le choix de régulation thermostatique doit d’autre part tenir compte de la chaleur produite par le procédé lui-même. Plus de 99 % de l’énergie du procédé est dispersée sous forme de chaleur. Dans certains cas, il est donc nécessaire non plus de chauffer mais de refroidir le produit.

g-Cas des émulsions multiples

La méthode la plus répandue de préparation des émulsions multiples passe par deux étapes successives d’agitation dans des conditions différentes. La figure suivante présente le protocole type d’émulsification en deux étapes.

 52- Les agitateurs mécaniques

a-les disperseurs
La dispersion est pratiquée dans des cuves équipées de mobiles d’agitation.

La formation des gouttes résulte d’un équilibre entre rupture et coalescence. Les mobiles d’agitation utilisés doivent non seulement produire un fort cisaillement mais aussi assurer une bonne circulation des liquides de façon à limiter la formation de zones de coalescence. La taille des gouttes obtenues par l’utilisation des disperseurs va de 30 à 200 μm.

Le tableau suivant décrit les caractéristiques principales des cuves d’agitation. La figure montre l’intérêt des cuves chicanées.

Les mobiles d’agitation
Différents types de mobiles :
Voici la présentation des modèles de base de mobiles d’agitation.

  • L’hélice et la turbine favorisent chacune un schéma d’écoulement

    Les hélices sont des agitateurs dits axiaux qui favorisent plutôt la circulation du fluide dans l’axe du mobile. Elles sont utilisées pour les systèmes peu visqueux, plus faciles à disperser.

  • Les ancres, qui épousent la forme interne des cuves, sont efficaces pour assurer la circulation des fluides dans des cuves non chicanées.

    Elles sont utilisées en combinaison avec des mobiles générant un cisaillement au sein du fluide.

  • Les turbines propulsent le liquide depuis les pales vers les parois de la cuve.

    Des boucles de circulation au-dessus et au-dessous du mobile permettent le retour du liquide vers l’axe.

  • Les disques dilacérateurs ou disques de dispersion, comportant une série de dents de part et d’autre du disque, développent aussi un écoulement radial et sont fortement cisaillants.

Les turbines et disques dilacérateurs sont adaptés à la dispersion de fluides visqueux. Ce sont les mobiles les plus utilisés pour la fabrication des émulsions.

Les schémas ci dessus montrent les propriétés des deux principaux types de mobiles d’agitation.

Le développement d’un fort cisaillement ne doit pas se faire au détriment de la circulation du liquide. Il est possible de combiner turbine (ou disque dilacérateur) et hélice, par l’utilisation de mobiles à deux étages (biétagés) ou davantage (multiétagés) comportant a la fois turbine et hélice.

Taille du mobile
Le diamètre (D) du mobile est lié au diamètre (T) de la cuve. Le tableau suivant donne, pour chaque type de mobile, les valeurs du rapport D/T.

Type d’agitateur D/T
Agitateur axial 0.2 < D/T< 0.7
Agitateur radial 0.2 < D/T< 0.5
Ancre =0.95

Si le rapport D/T n’est pas optimal, le mélange se trouve perturbé : si D/T est trop faible, la phase légère reste pour partie en surface, si D/T est trop élevé la phase légère reste vers l’axe du mobile.
Le diamètre du mobile détermine, avec la vitesse de rotation, a la fois le cisaillement maximal développé et la consommation d’énergie. Il s’agit de minimiser la consommation d’énergie tout en gardant une bonne efficacité.

Position du mobile

La hauteur d’implantation du mobile (C), mesurée à partir du fond de la cuve, dépend de la hauteur de liquide dans la cuve, généralement égale au diamètre de la cuve (T). Les risques principaux sont d’avoir de mauvais mélanges et d’incorporer de l’air au système.
Des résultats satisfaisants sont obtenus pour C = 1/3 T.

D’autre part, la position du mobile d’agitation par rapport aux deux phases à émulsionner a une influence sur le type d’émulsion obtenue.

Ces schémas fournissent des indications mais connaissent des exceptions, en particulier dans le cas des émulsions concentrées : au-delà d’un pourcentage critique de phase dispersée, l’émulsion s’inverse.
Lorsque le mobile est positionné dans une des phases, celle-ci devient la phase externe de l’émulsion, quelque soit le protocole d’introduction de l’autre phase.
Par exemple, un mobile placé dans la phase aqueuse produira une émulsion de type aqueux (L/H).

Placée à l’Interface, la turbine développe d’abord les deux types d’émulsions. Le système évolue ensuite vers l’un ou l’autre type en fonction notamment de la formulation.

La disposition des systèmes biétagés doit se faire en prévision de l’objectif S’il s’agit de fabriquer une émulsion de type aqueux, la phase huileuse doit être propulsée vers la turbine pour être dispersée dans la phase aqueuse. L’hélice sera placée dans la phase huileuse et la turbine dans la phase aqueuse. La phase huileuse sera pompée vers le haut (down-pumping).

b-les paramètres des disperseurs

La vitesse et la durée de l’agitation en cuve conditionnent les propriétés de l’émulsion. Le choix d’une vitesse élevée favorise la rupture au détriment de la coalescence, donc le temps de mélange sera d’autant plus court que la vitesse sera élevée.

La vitesse

Un compromis est à trouver entre une vitesse assez élevée pour atteindre la granulométrie requise et pas trop élevée pour limiter la consommation d’énergie. La vitesse périphérique, correspondant à la vitesse obtenue en bout de pale, permet les comparaisons entre dispositifs. Elle dépend du diamètre du mobile (D) et de sa vitesse de rotation.
Le tableau ci-dessous donne les valeurs usuelles développées par les turbines et les hélices.

Durée de mélange
La durée d’agitation a une influence sur le diamètre moyen de l’émulsion et sur la dispersion. Le temps de mélange se définit comme la durée nécessaire pour parvenir à la dispersion requise, c’est-à-dire conforme à une spécification. La taille moyenne des gouttelettes diminue au cours du temps puis se stabilise lorsque l’équilibre entre rupture et coalescence est atteint. Mais le prolongement de l’agitation peut provoquer une augmentation de la granulométrie moyenne par múrissement d’OstWald. Généralement, plus la durée d’agitation est importante, plus la distribution est étroite, et une distribution bimodale peut évoluer en distribution rnonomodale. Mais des effets contraires sont parfois observés, notamment pour les émulsions concentrées.
L’estimation du temps de mélange peut se faire à partir de modèles théoriques développés pour chaque type d’écoulement (laminaire, turbulent ou de transition). Mais pour l’instant les simulations numériques d’écoulement restent trop fastidieuses pour donner des applications industrielles. L’estimation du temps de mélange reste donc expérimentale.

c-les mélangeurs rotor-stator

La dispersion est parfois insuffisante pour obtenir l’émulsion souhaitée, elle est alors suivie d’une homogénéisation qui permet une réduction de la taille des gouttelettes et un resserrement de la distribution de taille. Les homogéneisateurs (homogenízer en anglais, d’où le terme d’homogénéiseur fréquemment rencontré en français) développent de très forts cisaillements (jusqu’à 100 000 s’1) en contraignant le passage du pré-mélange dans une zone étroite entre une partie fixe et une partie mobile.

c1- les mobiles « rotor-stator »

Les mobiles rotor-stator fonctionnent selon le principe décrit sur le schéma ci-dessous.

Le rotor, tournant à grande vitesse, est percé de fentes à travers lesquelles le pré-mélange est aspiré. Dans l’entrefer étroit (inférieur à 1 mm) qui sépare le rotor du stator, des forces intenses de cisaillement s’exercent sur le liquide avant son expulsion à travers les fentes du stator.
De nombreuses têtes, interchangeables, sont commercialisées.

Les têtes se distinguent par leur géométrie, en particulier la forme et l’étroitesse des ouvertures du stator : fentes verticales, fentes obliques, ouvertures circulaires... Dans tous les cas la largeur de l’entrefer n’est pas ajustable.

c2- le moulin colloïdal
Le principe général est le même que pour les mélangeurs rotor-stator.

Le fluide d’entrée subit un premier étranglement avant le passage dans l’entrefer entre le rotor tournant à grande vitesse et le stator.

Les paramètres à régler sont :

  • la vitesse du rotor (généralement de 1 000 à 20 O00 tours par minute) ;
  • la taille de l’entrefer (généralement de 50 à 1 000 μm) ;
  • le temps de séjour de la substance à homogénéiser (peut être augmenté par diminution du flux ou par recyclage des produits).
    Les moulins colloïdaux s’utilisent soit sur un pré-mélange, soit directement sur les deux phases à émulsionner.
    voir l’animation de la société Fryma :

d-Comparaison des procédés d’agitation mécanique

Pour que l’émulsification soit efficace, le dispositif d’agitation doit développer un cisaillement important et permettre une bonne circulation du fluide.
Les procédés d’agitation mécanique peuvent être classés en fonction de l’intensité du cisaillement développé et de leur capacité de pompage.

Les deux exigences sont antagonistes  : les procédés les plus efficaces pour mettre le liquide en circulation sont les moins cisaillants et inversement.
Si le pompage développé par le mobile cisaillant est insuflisant, l’équilibre rupture <=> coalescence est déplacé dans le sens de la coalescence. Dans ce cas, il est nécessaire de lui coupler un autre mobile.

Le mobile développant le cisaillement le plus intense (rotor-stator ou autre) doit être placé sur la boucle de circulation créée par l’autre mobile (hélice à fort débit de pompage, ancre).

 53- Les Mélangeurs statiques

Les mélangeurs statiques sont les dispositifs privilégiés pour effectuer des dispersions en continu. Il s’agit de tubes généralement montés en série. Les phases à disperser, mises en mouvement par des pompes, circulent dans ces conduits contenant divers éléments fixes (lamelles, hélices, etc)

Les éléments présents dans le conduit modifient la circulation des fluides en les orientant dans les directions transverses à l’écoulement. Les flux se divisent et se recombinent pour aboutir progressivement à la dispersion.

Le principal paramètre opératoire à régler est le débit. ll détermine la taille moyenne de l’émulsion, dans tous les cas sensiblement supérieure au micromètre. ll est souvent nécessaire de compléter l’émulsification par une opération d’homogénéisation adaptable en continu.

 54- Les Homogénéisateurs Haute Pression

Ce procédé haute pression utilisent des pompes à haute pression envoyant le fluide à traiter vers un élément statique. Les pressions pratiquées contraignent le passage du liquide à travers des éléments de géométrie variée, qui conditionnent les mécanismes de rupture.

Les fluides passent dans une tête d’homogénisation comportant elle-même une valve ou clapet d’homogénéisation

La rupture des gouttes s’explique par  :

  • les forces de cisaillement ;
  • le phénomène de cavitation.

Le cisaillement intense est lié au passage du produit dans l’espace étroit de la lumière du clapet : après entrée dans l’axe de la tête d’homogénéisation, le produit est projeté radialement et laminé entre siège et clapet. Ce dernier, maintenu par un ressort ou un dispositif hydraulique, est décolle de son siège sous la pression du produit.
La cavitation est liée a l’importante dépression accompagnant l’accélération du fluide lors de son entrée dans la tête d’homogénéisation : le passage de tuyaux de quelques centimètres de diamètre a des espaces étroits, de l’ordre de la dizaine de microns, augmente la pression dynamique du fluide (liée a sa vitesse d’écoulement) mais fait chuter sa pression statique.

C’est le procédé le plus utilisé en agroalimentaire pour produire des émulsions fines ou pour affiner des émulsions naturelles. C’est par exemple le cas de l’homogénéisation du lait entier, des crèmes desserts et autre yaourts entiers. Il est aussi utilisé dans l’industrie pharmaceutique et en cosmétique.

 6- Applications

 61- Émulsions alimentaires

Les opérations d’émulsification sont mises en œuvre dans le domaine alimentaire soit pour améliorer des émulsions naturelles (exemple du lait entier), soit pour créer des émulsions à partir de phases au départ non dispersées.
La formulation alimentaire se fait sur la base d’exigences organoleptiques, parfois nutritionnelles. Les ingrédients alimentaires comportent souvent
des molécules participant à la stabilisation de l’émulsion, notamment des protéines. Les éventuels émulsifiants rajoutés doivent être choisis dans la
liste des additifs autorisés à des doses respectant la réglementation.
Le tableau suivant présente une série d’exemples d’émulsions alimentaires et précise les méthodes de préparation et les structures de stabilisation.

Presque toutes les émulsions alimentaires sont de type aqueux, à l’exception notable du beurre et des margarines. La stabilisation fait très souvent intervenir plusieurs éléments. Par exemple, dans le cas d’une margarine, la stabilité cinétique est largement assurée par la forme cristallisée du produit mais le choix des émulsifiants est
déterminant pour l’homogénéité et la stabilité de l’émulsion avant cristallisation. Les émulsions à base de lait sont stabilisées par les caséinates, en plus d’éventuels tensioactifs de faible poids moléculaire.
Les sauces sont les émulsions alimentaires les plus proches des émulsions modèles, dans la relative simplicité de leur structure. La mayonnaise peut être prise comme exemple type d’érnulsion alimentaire, sans oublier sa particularité d’être une émulsion concentrée de haute viscosité.

Un exemple de process de fabrication de sauce mayonnaise est donné l’article suivant

un exemple de process de fabrication de saucisses knacks est donné dans l’article suivant .

un exemple de fabrication de mousse de foie est donné dans l’article suivant

 62- Émulsions cosmétiques et pharmaceutiques

La formule et les procédés de fabrication des émulsions cosmétiques et pharmaceutiques les plus courantes, destinées à une application topique, sont assez proches.
Leur composition est très contrôlée pour des raisons sanitaires, les choix d’ingrédients obéissant dans les deux cas a des contraintes réglementaires. Leur structure est simple par rapport a celle de nombreuses émulsions alimentaires mais les voies d’administration des émulsions pharmaceutiques sont variées et les contraintes de formulation et de structure (finesse) plus grandes. Enfin, dans le cas des émulsions pharmaceutiques comme dans celui des cosmétiques, l’action du produit sur l’organisme implique le plus souvent une rupture de l’émulsion, dont les conséquences, en terme d`effet physiologique ou sensoriel, doivent être prises en compte.

un exemple de fabrication de crème cosmétique & pharmaceutique est développé dans l’article suivant