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De l’efficacité des auto-contrôles !

Pizzas Buitoni : un scandale sanitaire !

Des négligences en chaine provoquées par une recherche de profits à tout prix !

mardi 1er novembre 2022, par Amrouche

A travers l’analyse de ce scandale sanitaire, nous allons découvrir :

  • comment l’hygiène reste le prérequis indispensable à la maitrise sanitaire d’une entreprise agroalimentaire
  • les auto-contrôles et leur limite
  • l’insuffisance des contrôles officiels
  • la nécessité d’encadrer les autocontrôles
  • comment la recherche de profits effrénés est incompatible avec la maitrise de la sécurité !

 
Le scandale des pizzas Buitoni cotaminées


Début 2022, des pizzas Buitoni ont été rappelées à cause d’une contamination par la bactérie E. coli. Des dizaines d’enfants sont tombés malades, dont deux ont succombé. « Envoyé spécial » a enquêté sur ce scandale sanitaire.

Vidéo du reportage d’Envoyé Spécial du jeudi27 octobre 2022

Santé Publique France dénombre 56 cas confirmés de syndromes hémolytique et urémique (SHU) liés à la bacétie E. coli et à la consommation de pizzas Buitoni au 4 mai 2022.
Le SHU est une maladie très grave qui s’attaque aux organes vitaux. Elle est provoquée par des intoxications liées à Escherichia Coli qui est une bactérie pathogène d’origine fécale. La majorité des consommateurs intoxiqués sont des enfants (1.5 ans à 17 ans ; âge médian= 6 ans) ;un seul adulte est intoxiqué. Deux enfants sont morts : Kelig (2ans et demi) décédé le 10/3/2022 et Nathan (8ans) mort le 18/2/2022.

  Comment en est-on arrivé à un tel scandale sanitaire en 2022 ?

Des documents confidentiels ainsi que des témoignages d’anciens employés (ouvriers, chef d’équipe…) ont permis aux journalistes de l’émission « Envoyé spécial » de France 2 de mettre à jour des pratiques d’un géant de l’agroalimentaire (NESTLE) très négligent au niveau de l’hygiène de fabrication de ses produits. Le problème ne concerne pas seulement l’usine Buitoni de Caudry dans le Nord de la France, mais un reportage dans une autre usine du groupe a montré que l’attrait du profit passait avant l’hygiène donc la santé du consommateur ! (7min 27)
Le 18/3/2022 l’entreprise est contrainte de rappeler toutes les pizzas de la marque « Fraich’Up » car contaminée par E.coli. Ces pizzas provenaient toutes de l’usine Buitoni de Caudry dans le Nord de la France et appartenant à la multinationale Suisse NESTLE. Cette usine est arrêtée depuis ce jour !

[9min 30] Des années auparavant un ancien employé avait témoigné de graves manquements au niveau de l’hygiène de l’usine Buitoni de Caudry, en le signalant à sa hyérarchie et à une site web lanceur d’alerte (Mr Mondialisation) : mauvaise hygiène des surfaces (sols, matériels), des employés. L’encadrement n’intervenait qu’à la suite de non-conformité de produit ; quelques jours plus tard, les rêgles d’hygiène s’oubliaient rapidement ! La maison mère Nestlé a toujours réfuté ces allégations et accusations au niveau du manque d’hygiène.

 Quand cela a -t-il commencé exactement ?

[12min 40]
La situation a commencé à se dégrader au niveau de l’hygiène en 2014 quand le groupe Nestlé a voulu augmenter la productivité de l’usine Buitoni de Caudry.
En 2015 l’augmentation de la production s’est faite au détriment de l’hygiène : en effet, les plans de nettoyage et désinfection qui étaient très bien réalisés jusque-là par un sous-traitant professionnel extérieur a été modifié en passant en interne et en réduisant les durées de 8 heures de nettoyage pour 16 heures de fabrication à 4 heures 45 pour 27 heures de fabrication ! Le personnel s’est plaint d’un manque de temps et de formation à l’hygiène ! La direction a manqué de réactivité et de professionnalisme ! De nombreuses zones de l’usine pas ou peu visibles n’étaient plus nettoyées !

 les autocontrôles

Pourtant il est prévu des contrôles pour maitriser l’hygiène et éviter les risques de contamination ! : les autocontrôles
[15min 54]
Les entreprises sont obligées par la loi appelée « paquet hygiène ou food law »de mettre en place des tests aux endroits les plus opportuns (endroits sensibles aux contaminations) selon un plan de contrôle qui est validé par l’administration c’est-à-dire la DDPP (Direction Départementale de la Protection des Populations) ou DGCCRF (Direction Générale de la consommation, Concurrence et Répression des Fraudes). L’administration fait confiance à l’entreprise qui se contrôle elle-même  ; elle n’a pas obligation de signaler les non conformités à l’administration !

La limite des autocontrôles :
Selon le témoignage d’un ancien chef d’équipe de l’usine Buitoni, les tests réalisés par l’entreprise étaient détournés sur des zônes propres pour éviter les non conformités ! Ceci confirme que sur le terrain l’entreprise aurait triché au niveau de ses autocontrôles !

On peut se demander si ces autocontrôles pourtant obligatoires et nécessaires pour maitriser la qualité sanitaire des produits alimentaires sont suffisamment encadrés par l’administration ?
[18mi48]
L’administration représentée par la DDPP/DGCCRF rend obligatoire la mise en place d’autocontrôles sur les lignes de fabrication alimentaire. C’est à l’entreprise d’identifier les zones à risques sanitaires et de mettre en place des mesures de maitrise pour éviter les risques de contamination. Parmi ces mesures de maitrise, il y a la surveillance du process par la mise en place de tests ou contrôles à une fréquence pertinente (plan de contrôles) et bien sûr des plan de nettoyage et de désinfection efficace qui est un prérequis obligatoire. Une fois le plan de contrôle du plan de maitrise sanitaire validé par la DDPP, il n’y a plus de contrôle de l’administration ! On fait confiance au professionnalisme de l’entreprise !
En cas d’autocontrôle présentant une non-conformité, la loi ne rend pas obligatoire le signalement à l’administration !
Pour le cas de l’usine Buitoni de Caudry aucun signalement d’autocontrôle non conforme n’a été fait à l’administration alors qu’il y a eu au moins un autocontrôle non conforme au niveau de la farine en aout 2021 : la farine était contaminée par E.coli selon un document confidentiel communiqué aux journalistes d’Envoyé Spécial !

 Les contrôles par l’administration (DDPP) :

L’entreprise n’a été contrôlée que 5 fois en 10 ans ! Malheureusement quand l’administration prévoit un contrôle, elle prévient au moins 24Heures avant l’entreprise ! Les résultats sont alors rarement négatifs, bien que les problèmes lourds de dysfonctionnement par rapport sont rarement corrigeables en 24H, comme le prouve les traces de moisissures …à l’usine Buiotoni !

 L’origine de la contamination ?

[21min13]
Les règles d’hygiène sont elles correctement respectées dans les usines du groupe Nestlé ? Une caméra cachée dans une autre usine Nestlé montre que l’hygiène est bâclée : au niveau de la formation des nouveaux employés et au niveau du management en général (blouses sales, mains non lavées, rupture de la chaine du froid…) !
Le groupe Nestlé essaie de rejeter la faute sur les fournisseurs !
[28min]
En effet, la contamination ayant été localisée au niveau de la pâte, il était facile d’incriminer son ingrédient principal : la farine ! Malheureusement pour Nestlé, les 2 fournisseurs de farines (meuniers) maitrisent la qualité sanitaire de leur produit et n’ont jamais eu aucun problème de contamination ! L’ANMF (association nationale de meunerie française) répond par ailleurs à Nestlé que leur code de bonne pratique d’hygiène prévoit un nettoyage annuel des silos de stockage des farines ! Or depuis 2015 début de la nouvelle stratégie de réorganisation de la production et du nettoyage de l’usine Buitoni, les silos de stockage de farine n’ont jamais été nettoyés !

 Conclusion : Comment faire pour que ce type d’accident sanitaire dramatique ne se reproduise plus ?

[37min40]
Ce type d’accident sanitaire dramatique risque de se reproduire notamment dans ces entreprises qui sont pilotées de très loin par des gestionnaires issues des grandes écoles de commerce par des intérêts uniquement financiers et qui veulent atteindre leurs objectifs « quoiqu’il en coute ! »
Une commission d’enquête de l’assemblée nationale a été ouverte pour mettre en évidence les responsabilités dans cet accident dramatique !
Une idée serait de mieux encadrer les auto-contrôles en les encapsulant comme dans une boite noire d’avion qu’on enverrait directement à l’administration.

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