Les enjeux de l’industrie agroalimentaire vis à vis de la question environnementale

Les pistes d’éco-conception pour l’agro-alimentaire

Comment baisser l’empreinte environnementale des produits alimentaires ?

L’alimentation est un besoin vital pour la population. Or celle-ci ne cesse de s’accroitre puisque ‘on prévoit une population mondiale de 10 milliards d’habitants à la fin du XXIème siècle. La planète devra nourrir sa population !
En 2007, le« GIEC » (Groupe Intergouvernemental d’Experts sur l’Evolution du Climat) a estimé dans son rapport que l’agriculture représentait 13.5% des émissions mondiales anthropiques de gaz à effet de serre. (GES).

 <big><span style="color:#008000;"><center>Les pistes d'éco-conception pour l'agro-alimentaire</center></span></big>

Secteur clé dans l’économie française, l’agroalimentaire doit aussi faire face à diverses controverses, quant à son empreinte environnementale, du gaspillage, aux enjeux sur les terres arables, le tout influencé par les évolutions des modes de vie à l’échelle mondiale.

Comment combler les besoins alimentaires de chacun, tout en tentant de réduire nos Impacts sur l’environnement ?

Pour en savoir plus sur les raisons qui poussent l’industrie alimentaire à réduire son empreinte environnementale voir mon article précédent !

Cette approche est supposée globale avec la prise en compte de tout le cycle de vie du produit et de tous les critères environnementaux.

Conception classique vs éco-conception :

La conception classique d’un produit prend généralement en compte des aspects marketing c’est à dire l’attente des clients, les aspects techniques de faisabilité de production du produit et les aspects économiques de maîtrise des coûts et de rentabilité des entreprises.

La conception de produits durables ou éco-conception doit en plus de ces trois grands critères prendre en compte les critères environnementaux pour une entreprise agroalimentaire

Leviers & Opportunités pour les entreprises : :

Les approches d’éco-conception offre des leviers et des opportunités importantes.
Tout d’abord cela offre aux entreprises un gain de compétitivité : via la réduction des coûts économiques grâce à l’optimisation des flux de matières, d’eau et d’énergie, via de nouvelles pistes d’innovation et de créativité qui permettent de pénétrer de nouveaux marchés émergents, via le respect des exigences des intermédiaires comme certains clients comme les GMS ou les clients finaux qui sont de plus en plus sensibles à ces approches d’éco-conception.

De manière globale pour l’entreprise ces approches offrent une meilleure attractivité et une meilleure image via la responsabilité sociétale et environnementale (RSE).

Enfin ces approches permettent souvent d’anticiper les futures réglementations européennes ou françaises par exemple des réglementations liées aux emballages plastiques, liés aux additifs ou liées à la mise en place d’affichage environnemental sur les produits.

Néanmoins on remarque aussi d’importants freins pour faire adopter ses approches à toutes les entreprises notamment les petites et moyennes entreprises qui n’ont pas forcément les moyens d’aller vers ce type d’ approche

Freins pour les entreprises :

Effectivement les approches d’ecoconception demande des changements importants dans l’organisation. Elle demande aussi aux entreprises d’acquérir de nouvelles connaissances, parfois il y a des limites économiques de l’entreprise qui vont limiter certains investissements pour aller vers ces démarches là, mais aussi de manière plus générale le manque de temps et de moyens.

Les actions d’éco-conception peuvent être limités par certaines restrictions légales concernant surtout la sécurité sanitaire des aliments qui doit être une priorité pour les entreprises.

Les clients ne sont pas toujours à même de modifier leurs habitudes de consommation pour prendre en compte l’écoconception, enfin il faut savoir qu’il y a quand même une complexité des outils et des méthodes de la démarche d’éco-conception et parfois un accès difficile à l’information (base de données insuffisantes) pour permettre de mesurer les bénéfices de l’éco-conception pour l’entreprise.

Concrètement l’écoconception d’un produit agroalimentaire doit se faire avec une vision cycle de vie et il est nécessaire de prendre en compte toutes les étapes du produit dans une approche dite holistique.

 1-Ecoconception de la recette/Matières Premières

Le choix des matières premières est un levier majeur pour concevoir des produits alimentaires

Des matières premières provenant de l’agriculture biologique généreront en général moins d’impacts environnementaux que celles provenant de l’agriculture conventionnelle notamment sur les impacts liés aux pesticides et à la qualité des sols.
Néanmoins ce n’est pas une généralité : de par ses rendements parfois plus faibles l’agriculture biologique peut générer une empreinte carbone plus importante par kg de produits que l’agriculture conventionnelle car elle va nécessiter par exemple plus de passages de tracteurs. Les modes de culture raisonnée peuvent aussi apparaître très pertinents.

Une recette végétarienne génère aussi moins d’impact qu’une recette carnée car la matière première carnée a un impact environnemental très supérieur aux matières premières végétales.

• En termes de mode de conservation, les produits frais bruts (1ère gamme) demandent moins d’énergie ou de packaging que les produits en conserve (2ème gamme) ou les produits surgelés (3ème gamme).
Il faut toutefois garder en tête que le mode de conservation permet aussi d’éviter le gaspillage alimentaire et cette question de la conservation n’est donc pas si évidente.

La saisonnalité est aussi un élément à prendre en compte pour les impacts environnementaux en plus des aspects organoleptiques car les produits hors saison vont nécessiter des serres le plus souvent , souvent chauffées et donc requérant de l’énergie supplémentaire.

Les ressources locales vont demander moins d’étapes de transport donc avoir un impact plus faible en général que les ressources lointaines, néanmoins il faut aussi considérer les effets d’échelle et parfois les matières premières un peu plus lointaines mais dont le mode de transport est sobre et optimisé peut se révéler pertinents.

• Il convient enfin de limiter les additifs pour éviter les impacts de leur production

 2- Ecoconception pour éviter le gaspillage

En ce qui concerne le gaspillage alimentaire, il faut savoir que toutes les étapes du cycle de vie sont concernés.

En France un tiers de la nourriture n’est pas consommée mais jetée ! Cela correspond en moyenne à 137 kg de nourriture par personne et par an soit 9 millions de tonnes /an.

On retrouve ces pertes à toutes les étapes :

  • En production agricole de matières premières à hauteur de 30 % des pertes totales à cause des pertes au champs lors de la récolte ou alors à cause du rebut de produits non calibrées et/ou ne correspondant pas au cahier des charges exigé par l’industrie alimentaire.
  • La transformation, le transport et le stockage des produits agroalimentaires génère 21% du gaspillage alimentaire français à cause de process de conditionnement défectueux, à cause de casses d’emballage de rupture de la chaîne de froid…
  • Dans la distribution, c’est 14% du gaspillage alimentaire à cause des invendus ou de produits abîmés.
  • Enfin c’est l’étape de consommation qui génèrent le plus de gaspillage environ un tiers en France à cause de déchets de préparation des restes de repas jetés ou de produits périmés.

Les solutions pour limiter le gaspillage en industrie agro-alimentaire :

Pour une entreprise agroalimentaire, de nombreuses solutions tout au long du cycle de vie peuvent permettre de limiter le gaspillage alimentaire.

En effet pour une entreprise agroalimentaire il est possible de valoriser des sous produits agricoles dans la recette et donc d’influer sur l’étape de production des matières premières.

Lors de l’étape même de fabrication du produit, on peut valoriser les sous-produits du procédé (ex : recyclage de rognures de panification…)

Lors des étapes d’emballage et de distribution : le choix de la forme et de la matière de l’emballage peut permettre d’éviter de perdre des produits et d’optimiser le chargement du transporteur. Les produits non conformes pour la vente mais encore salubres pour la consommation peuvent être redistribués aux employés...

Enfin durant l’étape de consommation du produit, il y a plusieurs pistes :

  • Prévoir un emballage refermables et compartimentable.
  • Être clair sur la date de péremption, entre la date « DLC » (date limite de consommation) ou « DLUO » (date limite d’utilisation optimale) remplacée par la « DDM » (date de durabilité minimale) du produit.
  • Préciser les emplacements de conservation et les possibilités de congélation ou d’utilisation des restes pour aider le consommateur à limiter le gaspillage alimentaire.

 3- Impacts des modes de transports

Pour toutes les étapes de transport nous avons déjà vu l’intérêt de privilégier les circuits courts. Il faut aussi choisir lorsque c’est possible les modes de transport les moins polluants donc ce qui génère le moins de gaz à effet de serre. Par exemple pour une ressource lointaine l’acheminement par bateau sera beaucoup moins impactante que l’acheminement par avion ramenée à 1 kg de produits comme vous pouvez le voir avec l’empreinte carbone des différents modes de transport par tonne de marchandise et par kilomètre.

  4-Réduire l’impact des étapes de fabrication (process)

En étapes de production il y a trois leviers principaux pour améliorer la performance environnementale des produits : l’énergie, l’eau et la gestion des co-produits et des déchets.

  41- Au niveau de l’énergie

Les industries agroalimentaires ont des besoins importants d’énergie. D’ailleurs il s’agit de la deuxième industrie la plus consommatrice en France après l’industrie chimique.
Il convient donc tout d’abord de jouer sur les postes de consommation d’énergie utilisés ; par exemple utiliser des procédés sobres en énergie. Les besoins de chaleur et de froid peuvent être optimisés en contrôlant et ajustant les barèmes de cuisson, de pasteurisation, de stérilisation.

Enfin il s’agit aussi d’agir sur les sources de production d’énergie et d’utiliser quand c’est possible des sources de production d’énergie alternatives et renouvelables. Certaines entreprises remplacent leur chaudière au gaz par des chaudières bois haut rendement, pour l’électricité il est possible aussi d’installer des panneaux photovoltaïques sur les toits des industries agroalimentaires.

 42- Au niveau de l’eau

Les industries agroalimentaires sont aussi des industries utilisatrices de fortes quantités d’eau et qui génèrent des eaux usées chargées en matière organique.
Ainsi les stratégies de gestion d’eau se situe au niveau de la limitation d’utilisation d’eau via les technologies économes en eau ou via l’optimisation des nettoyages et les quantités d’eau utilisées pour les étapes de nettoyage.
Au niveau de la limitation des pollutions des eaux usées il est aussi possible d’agir par exemple en récupérant les matières organiques sous-produits ou déchets contenus dans ces eaux ou en réutilisant ou recyclant une certaine partie de ces eaux dans d’autres process.

 43- Au niveau des co-produits et déchets

Les industries agroalimentaires génèrent aussi des co-produits et des déchets le plus souvent organiques et il faut essayer de privilégier une valorisation de ces co-produit avec des valorisations en forte fonctionnalités.

Ici sont présentés une hiérarchisation des valorisations selon leurs fonctionnalités :

  • Tout d’abord il faut préférer les valorisations « matière » dédiées à l’alimentation humaine.
  • Lorsque ce n’est pas possible, il faut choisir une valorisation matière pour l’alimentation animale.
  • S’il n’est pas possible d’utiliser ces matières organiques pour l’alimentation, vous pouvez aussi privilégier des valorisations matière pour d’autres fonctions non alimentaires par exemple pour faire des matériaux ou du compost.
  • Si aucune valorisation matière n’est possible il est toujours possible de valoriser de manière énergétique les sous-produits via l’incinération et la récupération d’énergie, ou la production de biogaz (méthanisation).
  • Enfin la dernière solution est celle de l’enfouissement et ça c’est à réserver pour les déchets ultimes qui ne peuvent pas être valorisés.

 5- Réduire l’Impact des emballages

Un pan important dans l’éco-conception des produits agroalimentaires c’est la question du packaging.
Pour écoconcevoir le packaging tout d’abord il s’agit de l’action d’allègement du packaging primaire et secondaire afin de réduire la quantité de matière présente dans le packaging.

L’optimisation du volume des packaging est aussi importante afin de réduire les impacts du transport.

L’utilisation de matériaux qui ont un faible impact lors de leur production est une action possible. Il peut s’agir de matières recyclées ou encore de matières bio sourcées. Ceci n’est pas à confondre avec l’utilisation de matériaux qui peuvent être valorisés en fin de vie et qui constitue donc aussi une action d’éco-conception.
Le fait d’utiliser des matériaux qui peuvent être recyclables grâce à des filières existantes en France, des matériaux qui peuvent être biodégradable ou compostables ou encore des matériaux qui peuvent être directement réutilisables avec un système de consigne.
Il est aussi nécessaire d’apposer les consignes de tri sur le packaging afin de guider le consommateur dans ses gestes de tri.

Enfin la réduction de l’utilisation des additifs tels que les colles, les encres minérales constitue aussi une action d’écoconception des packagings.

 51- Clarification du vocabulaire autour de l’éco-conception des emballages

Lorsqu’on parle de packaging écoresponsable, il y a souvent beaucoup de termes avec beaucoup de confusions entre différentes caractéristiques de packaging écoresponsables.

Il est important de revenir sur quatre caractéristiques qui sont parfois confondues entre elles mais qui ne représentent pas la même chose. On parle de matériaux recyclés, recyclables, biosourcés et biodégradables.

Matière Première recyclée :
Le terme recyclé est utilisé pour caractériser une matière première qui a été recyclée. Attention les matières premières recyclées ne sont pas forcément recyclables ; pour certaines matières comme certains plastiques il n’est pas possible de recycler à l’infini.

Matière recyclable en fin de vie :
Une matière recyclable est une matière qui pourraient être recyclés en fin de vie si une filière de recyclage existe pour ce matériau.

Matière première biosourcée :
Une matière première bio sourcée est une matière qui a été produite à partir de matières végétales comme le carton, certains plastiques biosourcés tels que le bio PET ou le PLA (PolyLactique Acide) qui est produit à partir d’amidon de maïs.
Attention le plastique biosourcé n’est pas forcément bio dégradables et n’est pas forcément recyclables. Un plastique biosourcé n’est pas toujours moins impactant qu’un plastique pétrosourcé. Effectivement les étapes de production des végétaux nécessaires à ces plastiques génèrent parfois un certain nombre d’impacts importants qui peuvent générer d’autres problèmes que les plastiques « pétrosourcés » et donc il est nécessaire de vérifier la pertinence environnementale de ses packagings avec des analyses du cycle de vie par exemple.

Matière biodégradable en fin de vie :
La matière biodégradable est une matière qui en fin de vie sous l’action d’organismes vivants peut se décomposer en élément divers qui sont dépourvus d’effets dommageables sur le milieu naturel.
Ces matériaux sont en général biosourcés, et ils peuvent donc se dégrader dans la nature sans aucun impact ou encore être compostés mais en général attention ils ne sont pas recyclables.

 52- Recyclabilité des emballages aujourd’hui

En termes de recyclabilité nous pouvons revenir sur celle des plastiques utilisés pour les packaging agroalimentaires.

Actuellement en France hormis dans certains territoires qui ont des filières de recyclage plus conséquentes, seul le PET (PolyEthylène TéréPhtalate ) reconnu par le numéro d’identification de plastique N°1 et le PEHD (polyéthylène haute densité) reconnu par son numéro d’identification N°2 sont recyclables. Il s’agit des plastiques utilisés pour les bouteilles et les flacons.

Le polyéthylène basse densité (PEBD) reconnu par le numéro 4 lui n’est pas encore recyclables et n’a pas de filière de recyclage performante en France. Il s’agit ici de tous les films souples qu’on va pouvoir retrouver dans les packaging agroalimentaires.

Le polypropylène (PP) numéro 5 qui est aussi souvent utilisé en packaging comme barquettes n’a pas de filière de recyclage en France. Néanmoins d’ici 2022 il est prévu d’améliorer les filières de recyclage et les technologies afin de recycler ce PEBD (Poly Ethylène basse densité) et ce polypropylène.

le PVC (polyvinyle chloride) et le polystyrène (PS) ne sont pas recyclables ; il n’est pas prévu de filières sur le court terme ; ces plastiques sont donc à éviter.

En ce qui concerne les autres types de matériaux d’emballage :

En ce qui concerne les autres packaging métalliques, verre et cartons ils possèdent des filières de recyclage en France à condition qu’ils ne soient pas associés à des éléments perturbants le recyclage comme certaines colles ou encres minérales.

Vous pouvez tester la recyclabilité des emballages sur le site : INFO-TRI